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Annunaki, la dure leçon du V 🛋💉

  • Photo du rédacteur: Axel Araujo
    Axel Araujo
  • 26 janv. 2022
  • 8 min de lecture

Dernière mise à jour : 11 août 2022


Vendredi 7 janvier 2022, Vald lâche une énième bombe nucléaire sur le rap français : un nouveau single intitulé Annunaki, premier extrait de son quatrième album V, annoncé pour le 4 février.


Ce morceau est suivi à 16 heures du clip qui l’illustre, plein de violence, d’horreur, et de dégoût, mais en creusant les paroles et les scènes du visuel, on retrouve finalement un univers très sombre que le rappeur parvient à éclaircir avec ses idées, ses convictions et ses objectifs pour la société.


Vald – V (2022) Vald – Annunaki

Pochette : Libitum Réalisation : Bien Vu



> PARTIE 1 : CE MONDE EST TOUJOURS CRUEL



Vald en a conscience depuis longtemps, ce monde est voué à une fin proche et pour le moins désastreuse.


Agartha, son premier album, était déjà rempli de messages sérieux au sujet de la société de consommation, du pouvoir, et de la possession inégale des richesses dans le monde, notamment avec les morceaux Megadose et Neo. Malheureusement, le côté plus humoristique du projet ainsi que sa réputation de rappeur trop parodique n’ont fait que camoufler ce message dans une masse de critiques trop à côté de la plaque.


Après XEU, son deuxième album, le message s’était encore un peu plus étouffé. Pas de réel morceau engagé, si ce n’est Gris, Réflexions basses et quelques phrases par-ci par-là. Pourtant, l’album semblait plus introspectif que le précédent, comme on le voyait dans Ne me déteste pas, ou encore l’excellent Deviens génial, écrit après une scène vécue avec son fils. Mais l’histoire qui commençait à être racontée dans certains morceaux d’Agartha semblait s’estomper peu à peu.


Bien heureusement, elle ne faisait que sembler l’être, car le 10 octobre 2019, Vald sort son troisième album solo : Ce monde est cruel. Et cet album est un véritable exposé, une compilation de 16 titres et 4 titres bonus basée sur un seul et même thème : le côté cruel et impitoyable d’un monde décrit par l’artiste.

Ce monde, c’est très surement celui dans lequel nous vivons, celui dans lequel notre société nous a transformés en êtres aveuglés, prêts à tout pour empocher assez d’argent pour survivre aisément.


Ce monde est cruel marquait un réel tournant dans la carrière de l’artiste : un tournant plus ouvertement politisé et philosophique, qui n’en reste pas moins désagréable à écouter. Ce projet est donc le plus conscient de Vald, car c’est également celui qui ouvre la porte à une nouvelle ère, à une future société bâtie par le peuple lui-même, à un monde bien moins cruel.


Depuis l’album précédent et même depuis Agartha, Vald instaure cette notion de leçon dans certains de ses textes et se place comme le professeur d’une future génération, constituée notamment d’une grande partie de ses auditeurs actuels.

Mais que faire après avoir exposé le caractère cruel du monde dans lequel nous vivons ? Que ferait-on si nous étions face à une classe pleine de millions d’élèves ? Un bon problème de maths ne servirait à rien sans sa résolution, et pour cela, il faut apprendre la technique aux élèves.

Pour faire plus clair, maintenant que Vald a concentré son énergie dans les grandes problématiques de ce monde, la suite logique des évènements serait que, désormais, il partage les solutions qu’il a pris le temps d’acquérir durant ces 3 années sans album solo.


Dans Rappel, le dernier morceau de Ce monde est cruel, Vald interpellait très clairement l’auditeur en disant « Faut changer les choses, si c’monde est cruel, c’est sûr qu’y’en a d’autres ». Les faits sont très clairement exposés : Vald est conscient d’un problème qui ronge l’humanité, et compte faire tout son possible pour changer les choses, faire de ce monde cruel un monde meilleur.



> PARTIE 2 : LE POUVOIR DE CHANGER LES CHOSES



Le vendredi 7 janvier, l’histoire se poursuit donc avec Annunaki, le premier single du quatrième album. Un morceau cru dans les paroles, s’adressant une nouvelle fois à l’auditeur, dans un but clair, mais pas sans s’attaquer aux principaux concernés.


Et contrairement à ce qu’on pourrait penser, nos principaux ennemis ne sont pas directement les « hauts-placés » qui profitent du système capitaliste. Les ennemis du monde sont bel et bien les humains eux-mêmes, ou plutôt certaines caractéristiques qui définissent les humains aujourd’hui, notamment la flemmardise, la contre-productivité ou encore l’espoir sans réels actes derrière.


Afin d’illustrer ce propos assez complexe, Vald utilise le premier couplet d’Annunaki pour rabaisser l’auditeur et le remettre en question sur sa situation. En lui faisant remarquer peu subtilement son langage, son quotidien vide et sans cesse répétitif, l’absence d’argent ou encore de projets, Vald expose quelques-uns des plus grands problèmes qu’un jeune peut avoir dans sa vie.

D’autres phrases plutôt marquantes nous font comprendre que le principal élément qui bloque cette avancée est l’humain lui-même. « Tu t’fais du mal comme si ça t’faisait du bien », « Peut-être que rien ne va pour toi car tu crois qu’j’suis chanceux », Vald démontre ici des mentalités contre-productives, bien trop répandues de nos jours, sur lesquelles il avait déjà exprimé son ressenti il y a quelques années lors d’une interview pour Rapelite.com : « Alors quoi, c’est la chance qui nous a fait péter ? On a pas travaillé ? J’suis très énervé si on me dit que j’suis chanceux ».


Vald – Annunaki En immersion mouvementée avec Vald

Réalisation : Bien Vu et son équipe (Rapelite.com)



Mais ce n’est malheureusement pas le seul point négatif qui intervient dans le comportement humain.

Dans le clip, Vald reprend une idée qu’il avait déjà quelque peu développée dans Ce monde est cruel, et plus précisément dans les morceaux Journal Perso II ou encore Rappel, avec la phrase « On t’donne pas les armes pour voir la magouille, on t’donne […], du divertissement pour tous les profils, que tout l’monde s’amuse ».

En effet, dans Annunaki, le divertissement et la publicité sont représentés assez explicitement par une seringue, en premier lieu dans la télévision, puis dans la réalité. Cette transition entre virtuel et réel, on pourrait la comprendre comme représentant les conséquences directes de la société de consommation sur notre personne.

On peut d’ailleurs remarquer qu’à force de consommer ces divertissements nocifs pour le développement et l’avancée de l’être humain, il devient lui-même un produit consommé par d’autres.


D’abord hypnotisé par la télévision et la publicité, le personnage incarné par Vald teste à contrecœur leurs effets directs, puis devient en quelque sorte victime du divertissement. Il se laisse emporter par l’idée d’une vie meilleure, et s’injecte de nombreuses seringues de Botox dans le visage, qui vont même jusqu’à modifier son mode de vie et de pensée.

On le découvre ensuite défiguré, mais semblant être plus apprécié des autres humains, qui répondent tous à un style de vie faussement idéal, qui représente ce que la société pourrait définir de « parcours réussi ». On distingue de grandes maisons très similaires, des habitants très souriants, en train de s’occuper de leur jardin ou leur voiture.

Vient ensuite l’overdose, la représentation très imagée de la surconsommation, avec la fin du clip très gore et sanglante. Le nouvel humain forgé par le divertissement qui l’entoure se retrouve consumé par celui-ci, et en vient même à être détruit à petit feu, comme illustré avec la décomposition de son corps.


Vald – Annunaki Vald – Annunaki

Réalisation : Bien Vu Réalisation : Bien Vu


Toute cette histoire, Vald l’a créé simplement pour faire réagir l’auditeur sur ses conditions de vie actuelles, et la place insignifiante qu’il occupe dans la société.

On pourrait donc croire que l’issue est uniquement négative, que le monde est destiné à une fin comme celle-ci, et que l’humain n’a plus aucun espoir de changer les choses.

Bien au contraire, Vald diffuse dans le même morceau un grand message d’espoir qui incite l’humanité à agir pour son bien, plutôt que d’attendre sa mort, sans jamais rien faire pour accéder au bonheur.


Après avoir rabaissé et remis en question l’auditeur comme le ferait un parent (« Bordel, reprends ta vie en main, va ranger ta chambre », « Té-ma ta vie flinguée, imagine celle d’après dans l’feu »), il décide de lui faire comprendre que chacun a un pouvoir, et qu’il suffit de faire ne serait-ce qu’un petit effort pour l’utiliser vers quelque chose de positif.

On retrouve cette idée dans le premier couplet, « T’es à ça d’la lumière, les ombres portées sont grandes », mais en plus grande partie dans le second couplet, et ce dès les premières phrases. Le sens de certaines parait très simple, mais en creusant un peu, une nouvelle compréhension plus complexe peut apparaitre, notamment pour « Je cherchais mon bonheur partout, t’étais assis d’ssus / Bébé, ton ul-c pourrait sauver tout l’monde ». En effet, la seconde partie pourrait être une subtile référence à l’expression crue « se bouger le cul », et signifierait donc qu’en se bougeant le cul, les humains auraient enfin la capacité de sauver le monde, et par la même occasion d’accéder au bonheur sur lequel ils étaient assis depuis le début.


A la fin de son deuxième couplet, Vald adresse un message direct à la nouvelle génération, celle qui possède l’avenir du monde entre ses mains, et leur redonne à nouveau de l’espoir : « A tous les rookies, jeunes adolescents / Futurs Annunakis sur la redescente / La route est longue vers les étoiles / Et plus tu montes et plus il fait froid ».

Depuis le début du morceau, l’artiste se plaçait lui-même en tant qu’Annunaki, c’est-à-dire un groupe de dieux qui apporterait la lumière, la connaissance sur Terre, mais désormais, c’est au tour de l’auditeur d’être comparé à cette forme spirituelle.

Par ce procédé, Vald veut nous faire comprendre, à nous les humains, que n’importe qui, s’il y met un peu du sien, peut monter haut (= s’élever, surement mentalement), et redescendre sur Terre en Annunaki, afin d’apporter de nouveau quelque chose de positif à ceux qui n’ont pas encore conscience de la cruauté du monde d’aujourd’hui.



> CONCLUSION : QUE FAUT-IL ATTENDRE DE L’ALBUM ?



Avec ce premier clip et single officiel de V, son quatrième album solo, nous ne pouvons qu’attendre un projet de très grande qualité. Après avoir officialisé son retour le 16 décembre 2021 avec un clip de 12 minutes intitulé Le retour du V, Vald n’a pas cessé de teaser la sortie imminente de son dixième projet, qui confirmera probablement la place de l’artiste comme étant un pilier du rap français, et ce depuis plus de 10 ans. Pour l’instant, 5 extraits ont été confirmés dans l’album, on y retrouve évidemment Annunaki, mais également les morceaux La machine, Nouvelle industrie, Ce soir, et Bien sûr, tandis que Where are my lovers?, dernier extrait figurant dans Le retour du V, n’a pas encore été officialisé.


Vald – Le retour du V V4LD Tour 2022

Réalisation : Kub & Cristo Artwork : Libitum



La direction artistique engagée que Vald emprunte depuis Ce monde est cruel redonne très clairement un nouveau souffle à sa carrière, et ce thème récurrent le suit depuis maintenant 3 ans. On peut facilement penser que cette directive sera de nouveau développée dans V, comme nous laisse croire le design de l’annonce de la nouvelle tournée, à la fin de Le retour du V.

L’album précédent a développé la face sombre du monde, avec sa cruauté et son absence de pitié, désormais, il est temps de voyager de l’autre côté de la planète, là où tout est plus clair, là où il y a encore une lueur d’espoir quant à l’avenir de ce monde. Dans son quatrième album, Vald incitera surement l’humain à agir pour le bien de la population, à l’image de Civilisation d’Orelsan, ou de FLIP de Lomepal, projets dans lesquels les artistes développaient déjà cette notion de vivre-ensemble, et de refus d’une société capitaliste, où l’échelle sociale dirige le monde entier.


Si certains pensaient qu’il n’avait plus le niveau requis pour reprendre une place parmi les grands de ce milieu, Annunaki a pourtant reconquit une large audience perdue depuis des morceaux plus légers, comme Mushu ou encore Footballeur. Vald n’a donc rien perdu de son talent d’écriture et d’interprétation, il suit simplement ce que l’envie le pousse à faire, c’est-à-dire la musique qu’il aime, et nous allons probablement le ressentir encore plus le 4 février, dans son quatrième album V.


Axel Araujo.


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